A travers différents outils participatifs, cet atelier avait pour objectif de permettre une meilleure compréhension des termes et enjeux du racisme systémique en France afin de questionner la place et les représentations des personnes racisées dans les arts et la culture.
Animation
- Alice GALLE, Chargée d’animation et développement de réseau international au CRID
- Natacha CAVATZ, animatrice à Lafi Bala
- Noémie BARILLET, Fracama – Fédération & Pôle Musiques Actuelles Région Centre-Val de Loire
Compte-rendu de l’atelier proposé par la Férue, Fédération des arts de la rue en IDF
1/ Participant·es en cercle : une personne vient partager un témoignage / une expérience
/ un questionnement en lien avec les questions de discriminations racistes.
→ Les personnes qui se reconnaissent dans ce qui a été dit viennent dans le cercle.
Plusieurs axes émergent : la discrimination « positive » / l’utilisation des personnes raci- sées comme « caution » / Comment déblanchiser la culture, les postes dans les structures, les rôles
2/ Poser le cadre : un temps sur les termes employés pendant l’atelier qui ne seront pas acceptables pour les intervenant·es comme :
• la discrimination positive (qui ne peut jamais être positive)
• employer les mots « black » « renoi » est une recherche de contournement pour ne pas avoir à dire le mot « noir », comme si c’était un tabou
• Le racisme anti-blanc : il n’y a pas de racisme anti-blanc
3/ Débat Mouvant :
→ Plusieurs termes sont accrochés dans l’espace (racisme systémique, racisme d’état, état raciste, racisme idéologique, racisme culturel…) ;
→ Des questions sont posées aux participant·es (ex : la ministre décide d’interdire le port du voile des athlètes des jeux olympiques…) : les participant·es se positionnent dans l’espace devant le terme qui correspond le mieux à la situation.
→ Débat sur plusieurs questions : la question de la laïcité, les violences policières, l’essentialisation des personnes racisées, la charge mentale
4/ Lecture du questionnaire proposé par Décoloniser les arts (reproduit ci-dessous)
Questionnaire « Décoloniser les arts »
Analysons les équipes :
– Connaissez-vous des non-blancs, non-blanches directeur ou directrice d’institution culturelle publique ?
– Si oui, dans des Scènes nationales ?
– Ou des CDN ?
– En France métropolitaine ou en outre-mer ?
– Dans des Théâtres nationaux ?
– Avez-vous des collaborateurs non-blancs dans votre équipe permanente ?
– Si oui, à quels postes ?
– Partagez-vous ce sentiment que la France est construite et nettoyée par une infra-société invisible et non-blanche ?
Observons les artistes associés :
– Avez-vous des artistes associé.e.s dans votre théâtre ?
– Quelle est leur couleur de peau ?
Observons les plateaux
– Pourquoi n’y a-t-il que des blanc.he.s dans la plupart des spectacles français ?
– Quel est le sens dramaturgique recherché ?
– La couleur de la peau est-elle d’ailleurs dramaturgiquement signifiante ?
– Pourquoi les metteur.e.s en scène français ne distribuent-ils pas davantage d’acteurs issus des diversités ?
– Avez-vous déjà invité un artiste que vous produisez à être attentif à la diversité dans sa distribution ?
– Si des « non-blancs » existent sur vos plateaux, c’est dans quelles proportions par rapport aux blancs ?
– S’il y a des Noirs, des Arabes, des Latins, des Asiatiques dans les spectacles que vous programmez, quels rôles ont-ils ?
– Combat de nègres et de chiens de Koltès, Les nègres de Genet, Chocolat clown nègre, sont-ce à votre avis les seules pièces qui permettent en France d’offrir un rôle à un Noir ?
– Dans ce monde là, Othello joué par un blanc parmi les blancs, on valide ?
– Dans votre établissement, les « non-blancs » sont-ils principalement programmés en danse et en musique (domaines de compétences généralement concédés aux noirs dans un imaginaire colonial) ?
– Avez-vous remarqué que le théâtre en France, reste une discipline associée à la parole, à la pensée, à l’intelligence et que dans un imaginaire colonial, sa pratique professionnelle reste réservée aux blancs ?
– S’il y a des non-blancs sur vos plateaux, sont-ils français ou étrangers ?
– Avez-vous remarqué que la plupart des interprètes noirs qui jouent en France, le font dans des productions internationales (américaines, anglaises, sud américaines ou africaines) ?
– Avez vous remarqué que les Afrodescendants français sont, eux, toujours ignorés ?
– Si votre théâtre est implanté en milieu rural, pensez-vous qu’il y a une certaine logique à ne pas beaucoup programmer d’artistes noirs puisque la population issue des immigrations vit essentiellement dans les zones urbaines et péri-urbaines ?
– À quelques exceptions près, dans quelles zones de France vote–t-on massivement pour le Front National ?
– Si des interprètes « non-blancs » ont accès à vos plateaux, accompagnez-vous également les productions de créateurs « non-blancs » : metteurs en scène ou chorégraphes (c’est à dire en position de direction) ?
– Pourquoi si peu ?
Posons-nous la question de la narration et des récits :
– Dans les histoires qui sont convoquées sur vos plateaux, les récits des immigrations, de la traite des Noirs, des colonialismes, des guerres de France, de la politique étrangère française, des minorités, des banlieues, des vies contemporaines et sensibles des personnes issues de ces histoires… sont ils racontés ?
– Par qui ces récits sont-ils racontés ? Des blancs ou des non-blancs ?
– De quelles couleurs de peau, de quelle(s) origine(s) culturelle(s) sont les auteur-e-s de votre saison ?
– Une Culture qui exclut une partie de la population est-elle un peu responsable de son sentiment de non-appartenance à la communauté nationale ?
– La culture peut-elle, encore véritablement, nous rassembler et nous permettre de nous reconnaître malgré nos différences ?
– Ce questionnaire est-il perçu par vous comme un reproche qui vous est adressé ou comme la demande émue d’une partie de la population de n’être plus oubliée ? D’être considérée.
➔ Accessibilité du secteur culturel étant très fermé : le niveau d’étude et de diplôme deviennent un critère important pour l’accessibilité à des postes dans des structures culturelles et, de fait, les personnes embauchées, ayant le niveau souhaité sont majoritairement des personnes blanches (en bref).
Pour les métiers admin/accueil public/chargé·e de prod/diff : Faut-il réévaluer les critères de sélection ? Ou les compétences que demandent certains postes ? Ou dédier du temps à la formation plus long avec plus de passation ? Ou tourner les phases de recrutement vers des profils de personnes sortant d’études non culturelles (ex : comp- tabilité) ?
➔ Déblanchir les équipes permettrait de légitimer les personnes racisées à postuler à des postes où elles savent qu’elles ne seront pas « la caution ou token (le jeton « diversité ») de l’équipe) ».
➔ Les réseaux nous ressemblent : si l’on sort de ses canaux classiques, on permet à d’autres vécus et réalités d’y rentrer
➔ Si une personne racisée est dans une équipe de travail, il faut la protéger (sans être discriminant·e ou passer pour le·la sauveur·euse) en mettant en place des actions et des discours au nom de la structure qui la légitime à être ici, pour éviter de de- voir se justifier d’être là ou de se prendre des regards ou des réflexions mal venues.
► Retrouvez tous les compte-rendus POP MIND réalisés par la Férue dans ce document.

Ressources
- Décoloniser les arts : https://www.r22.fr/antennes/decoloniser-les-arts. Page Facebook : https://www.facebook.com/decoloniserlesarts/?locale=fr_FR
- Décolonisons les arts ! À l’initiative du collectif « Décoloniser les arts », Leila Cukierman, Gerty Dambury et Françoise Vergès analysent, avec quinze artistes, la colonialité à l’œuvre dans le monde des arts et de la culture en France et proposent des pistes pour une décolonisation des formations, des institutions et des contenus. L’Arche, 2018.

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